I'd like to be cruel against you

J'entre sans me faire remarquer. Avec certitude, je sais que la propriétaire n'est pas là. J'ai attendu de voir la voiture s'éloigner pour entrer. L'intérieur est aussi banal et rangé que d'ordinaire. J'aurais bien envie de bousculer sa vie comme elle a su bousculer la mienne mais j'ai d'autres choses en tête. Il est temps d'agir de manière intelligente. C'est ce que je me répète depuis longtemps maintenant. Ce n'est pas la première fois que je viens comme ça en cachette mais les fois précédentes, je procédais à petite dose. Aujourd'hui, ma patience s'effrite.

J'entre dans la salle de bain et je sors de mon sac l'attirail nécessaire. Vicodin est inscrit sur la boîte que je pose sur le meuble. Il est certain que ces comprimés auront bien plus d'effets que ces petits trucs qu'elle prend encore maintenant. J'ai tout préparé, suffisamment pour que personne même pas elle ne remarque l'échange. Ils sont parfaitement identique si ce n'est dans leur composition et puisque je ne crois pas qu'elle possède quoique ce soit pour faire des analyses poussées, il n'y avait pas de soucis à se faire. C'était un moyen sûr d'agir contre elle, de la punir à ma façon, de me débarrasser d'elle et de la discréditer aux yeux du monde. Le seul problème avec mon idée, c'était que ça mettait trop de temps alors aujourd'hui, j'avais décidé de bousculer les choses et la dose.

Je savais qu'elle en avait une forte utilité, je l'avais vu à l’œuvre et en plus de ça, j'avais la chance de savoir quelques détails sur sa santé qui me facilitait les choses. Je changeais alors également les autres boîtes qui avaient fui la salle de bain et professionnellement, sans laisser d'empreintes superflues -on ne sait jamais !- je quittais les lieux non sans laisser un bouquet de fleurs devant la porte. Un dernier cadeau pour lui faire comprendre que la réalité était clairement de la merde et qu'au même titre que j'aimais l'alcool, ses chers comprimés pouvaient lui permettre d'y échapper au moins un instant !

Do you need to escape reality ?

alter ego, grace et compagnie

Le travail.
Elle se posait en arrêt, prenait quelques congés sans savoir qu'ils lui seraient d'une double absolue nécessité et rentra chez elle. Ce n'était pas quelque chose dont elle avait fait part à Riley, à Scarlett ni même à Anders. Elle agissait de son côté et décidait de s'éloigner quelques temps. Elle continuerait à travailler sur le seul gros dossier du moment, celui de Terrie Austen et des O'Leary mais n'aurait pu à s'y rendre pendant les deux prochaines semaines. Une précaution qu'elle avait préféré prendre pour une raison qui échappait encore à toute autre personne qu'elle-même.

Arrivée devant chez elle avec l'aide précieuse d'un chauffeur gracieusement payé à la tâche, elle trouva le bouquet avec inquiétude et panique. Elle était alerte sur ce que ça pouvait déclencher chez elle et il fallait qu'elle lutte. C'était comme si on voulait lui dire que quelqu'un savait. Des fleurs étaient à la fois évocateurs d'un bonheur passé mais aussi et surtout du bonheur perdu. La personne qui les lui donnait le savait et en jouait. Accepter le décès ne voulait pas dire qu'elle acceptait la façon dont ça s'était produit. C'était injuste et lui donnait toute la responsabilité. C'était clairement de sa faute et cette pensée assombrit considérablement son humeur.

Elle le prit néanmoins d'une main tremblante avant d'entrer chez elle, se rendant compte d'elle-même qu'elle n'avait pas fermé à clef, une nouvelle habitude qui déplairait sans doute à beaucoup de monde si elle l'évoquait. Elle était certaine que peu importe que la porte soit fermée ou ouverte, quand le mal voulait entrer, il trouvait toujours un moyen. Et puis il fallait déjà le vouloir pour se rendre compte de ce fait et donc être déjà mal intentionné. Sa logique semblait sans faille et malheureusement, elle ne saurait sans doute jamais ce qui se tramait quand elle n'était pas chez elle.

Plusieurs heures passèrent où elle regarda les fleurs qu'elle avait mis dans un vase. La bouteille d'un alcool sur la table basse et les médicaments à côté, elle hésita entre les deux. Un verre ne pourrait pas lui faire de mal mais c'était cela où les médicaments. Qui plus est, elle avait cruellement besoin des médicaments. Le choix qui se présentait finit par laisser le temps à diverses pensées noires de venir envahir son esprit. A cet instant, la décision fut prise. Elle l'avait déjà fait. Des médicaments, un peu plus que la dose prescrite, suffisamment pour l'emmener ailleurs un bref temps et échapper aux conséquences de ses actes ne pouvait pas être une mauvaise idée. Si elle avait su à ce moment là !...

Elle n'eut le temps de rien. Elle pensait pouvoir atteindre la chambre, se laisser aller sur le lit et y passer le reste de sa journée pour oublier la perte d'un être cher et sa culpabilité mais ne l'atteint pas. Au lieu de ça, le tapis fut jugé préférable même si on ne lui laissa guère le choix. A peine levée du canapé, ses jambes se dérobèrent et elle fut inconsciente avant même de le deviner.

Do you need to escape reality ?

Grace et compagnie

Etre facteur de Lewiston. Ca n'avait jamais vraiment été dans ses projets. Thomas était un flic, il l'avait toujours été et le sera sans doute toujours. Mais il ne pouvait pas exercer ici. Depuis qu'il était là, qu'il avait rencontré Imogen et qu'elle l'hébergeait, il se sentait redevable. Elle était celle qui l'avait aidé à trouver ce boulot et elle était si gentille alors qu'elle ne le connaissait même pas. Elle lui faisait penser un peu à Grace quand elle était plus jeune. A vouloir voir le monde en couleurs et être parfois un peu naïve quant à ce que voulaient les autres. Le monde n'était pas comme ça et il avait maintes fois essayé de le faire comprendre à sa femme. Même s'il n'avait pas un mauvais fond, il n'était pas une bonne personne depuis qu'il était arrivé à Lewiston.

La vie l'avait changé et il n'avait pas osé aller vers sa famille... Aujourd'hui, il s'était dit qu'il tenterait de le faire. Il en avait envie, Grace lui manquait, il voulait pouvoir voir Riley et cesser de se cacher. Il savait qu'elle était seule et donc qu'elle allait lui ouvrir la porte s'il sonnait pour ce colis qui lui était destiné. Il était prêt à faire ce pas vers elle, quitte à ce qu'elle le repousse ou qu'elle ne le croit pas, il était prêt à récupérer sa vie et sa famille. Mais c'était comme si un mauvais pressentiment le retenait. Il avait sonné et elle ne répondait pas. Patient, Thomas avait attendu une minute avant de faire le tour de la maison. Regarder par une fenêtre ou deux si elle était bien là. Mais rien.

Pourquoi ne viendrait-elle pas ouvrir la porte ? En pleine journée... Assez inquiet, il frappa de nouveau à la porte en l'appelant et n'ayant aucune réponse, il se dirigea vers la seule personne qui aurait sans doute accès à sa maison puisque Missy et Riley n'étaient pas à portée. Il traversa la rue, frappa à la porte. Prit soin de ne pas trop se montrer et expliqua à Anders qu'il avait un colis pour Grace et qu'elle ne répondait pas à la porte. Pour être sûr qu'il aille voir, il lui précisa qu'il pensait avoir entendu du bruit dans la maison et l'incita donc à sortir de chez lui.

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Expéditeur: Unknown
Destinataire: Anders Weiss
Message reçu, aujourd'hui.

Quoiqu'il arrive ce sera de ta faute. Et oui, j'ai fait un peu de ménage. Merci qui ?
-S

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Expéditeur: Unknown
Destinataire: Thomas Foster
Message reçu, aujourd'hui.

Trop tard...
-S

Do you need to escape reality ?

alter ego, grace et compagnie

On frappait à la porte.
Anders réprima un soupir et de lever les yeux au ciel. Il avait fermé la porte à clef et il n'était pas sûr que ce soit Grace qui venait le voir. Il abandonna tout ce qu'il était en train de tenir, il essayait de réparer son appareil photo qu'il venait de retrouver ... Cassé. Il ne se rappelait plus comment et depuis ce matin (si c'était le matin ...) il essayait de le réparer. Il n'y arrivait pas mais ce n'était pas cela le plus important. Anders soupira et se massa doucement le dos, allant ouvrir un peu la porte. Il s'était attendu à ce que ce soit Grace, mais ce n'était pas elle mais le facteur. C'était le matin alors ? Anders était déphasé et s'était attelé sur son appareil pendant la moitié de la nuit ? Il le réalisa assez rapidement et se reprit mine de rien. C'était un facteur qui avait un colis pour Grace, mais cette dernière n'ouvrait pas la porte. Il fronça les sourcils trouvant cela assez bizarre. Non pas parce que Grace n'ouvre pas la porte, parce qu'elle pouvait sortir de la journée... Mais que le facteur vienne à lui pour un colis. Ce dernier précisa avoir entendu un bruit dans la maison et Anders hésita à vouloir sortir. Il espérait qu'il n'arrivait rien de grave à sa meilleure amie, qu'elle n'ait pas chuté. Il espérait que ce n'était pas Gail, même si elle n'avait aucune raison de revenir dans la maison de Grace... Il hésita un moment donné et puis il repensa au rôdeur, à -S, à n'importe quoi qui pouvait attenter à la sécurité de Grace. L'écrivain hocha silencieusement la tête et retira les clefs de la serrure, il sortit et traversa la rue avec le facteur derrière lui.

Il n'avait pas fait attention à son visage. En réalité, Anders l'évitait et il n'aimait pas sortir comme ça. Il lui aurait fermé la porte au nez si ce n'était pas question de sa meilleure amie. Anders sentit son téléphone vibrer en plein chemin et il le sortit. Son visage se figea quand il lut le message et releva la tête vers la porte. Il serra fort le téléphone dans sa main et il força vite le pas pour mettre la main sur la poignée, sans frapper, sans sonner... Rien de tout cela et le pire, c'était que la porte était toujours ouverte. Il l'ouvrit, laissant le facteur en plan derrière. Le coeur d'Anders s'emballait et il appelait Grace. Pas de réponse. Il entra dans le salon et ce fut le moment de frayeur en la voyant par terre.

Sans attendre, Anders se dirigea vers elle, déjà rapidement sur ses genoux et il l'appela. Il essaya de la faire revenir sur Terre. Il entendit le facteur entrer et ce fut le moment là où il leva son regard en sa direction qu'il pu voir les médicaments et l'alcool sur la table. L'écrivain lâcha un juron et paniqua complètement essayant de garder son calme. Il ne retrouva pas les mots tout de suite, il dut faire la première chose comprenant qu'elle avait fait un malaise à cause des médicaments et de l'alcool. Il avait rapidement remarqué les fleurs mais il ne fit pas attention. Il la mit tout de suite dans la position de sécurité alors qu'il vit toujours le facteur là, il semblait être affecté par ce qui se passait. Anders avait failli lui demander s'il avait appelé les secours, il remarqua tout de suite le téléphone qu'il avait en main. Il vérifia la respiration de Grace et cela ne semblait pas être bon. Il était assez énervé et paniqué à la fois. Il n'avait jamais fait cela, il ne s'était pas attendu à ça surtout. Pas à ce que Grace veuille tenter de ... Il regarda les fleurs et repensa à -S. Il aurait dû garder ses distances... Il aurait dû.